Nana
Quand Niki de Saint Phalle faisait pénétrer le public à l’intérieur d’une Nana
En 1966, Niki de Saint Phalle présente au Moderna Museet de Stockholm Elle –
une cathédrale, une gigantesque Nana enceinte et allongée sur le dos,
à l’intérieur de laquelle les visiteurs sont invités à pénétrer, grâce à une ouverture située entre ses jambes !
Un projet immersif unique pour l’époque, au succès retentissant.
Cette entrée par l’origine du monde en pénétrant par le vagin, offre une visite organique des parois de cette grande dame, cette « cathédrale ». Ses hôtes pouvaient découvrir une fausse galerie d’art, une salle de cinéma dans le sein droit ainsi qu’un planétarium dans le sein gauche. Décrite par Niki comme ayant beaucoup de fonctions, elle était à l’image de ses œuvres monumentales qui échappent aux pouvoirs des collectionneurs et des musées. Par son imposante forme, son entrée organique, elle dévorait presque ses visiteurs. Il n’y a pas que l’extérieur qui compte, ce n’est pas que sa couverture. L’intérieur étant bien plus riche, Niki de Saint-Phalle devient presque par cette création, une architecte.
Cette œuvre sera visitée de juin à septembre 1966. De grandeur hors-norme, elle est caractéristique de la détermination de l’artiste. Elle aime la folie des grandeurs et s’impose dans les espaces publics avec une détermination sans nom. À la suite de cette œuvre gigantesque, elle créa des œuvres encore plus grandes et s’approprie l’espace public comme peu de femmes. En 1971, elle réalisa le Jardin des Tarots à Garavicchio, inspirée par le Jardin de Gaudì à Barcelone et en 1983 elle réalisa la fameuse fontaine Stravinsky dans le centre de Paris.
Sa collection la plus connue est « Les Nanas », ces grosses sculptures de femmes. À travers ses créations, elle émet un discours politique féministe et radical.
« Les Nanas » de Niki de Saint Phalle sont des sculptures qui représentent des femmes sorties de l’enfance, libérées de toute sentimentalité et rêve de mariage. Elles sont elles-mêmes, elles ne sont pas écrasées, elles n’ont pas besoin d’homme, elles sont indépendantes et joyeuses. Le désir de Niki de Saint Phalle en les faisant si grandes, est de voir les hommes plus petits que ses « Nanas ». Elle veut les voir écraser le sexe mâle dans une société qui opprime les femmes. Ses sculptures représentent des femmes dominatrices gaies et joyeuses. L’artiste considère que ces « femmes », qui sont un peu révolutionnaires, portent en elles le désir d’aller vers des émotions, des choses réprimées par la société.
Aude Adrien, Quand Niki de Saint Phalle faisait pénétrer le public à l’intérieur d’une Nana
Pour moi, mes sculptures représentent le monde de la femme amplifié,
la folie des grandeurs des femmes,
la femme dans le monde d’aujourd’hui,
la femme au pouvoir.
Niki de Saint Phalle
On ne peut s’empêcher de sourire quand on lit le message publicitaire annonçant « le grand roman qu’on attendait sur Niki de Saint Phalle ».
Sur les artistes, on attend plutôt des biographies, pour tout dire, mais le genre romanesque peut déplacer habilement le projecteur et fouiller les ombres. Dans l’actualité éditoriale, c’est la situationdes femmes, peintres ou modèles, confrontées au règne machiste qui est mise en lumière. À cet égard, Niki de Saint Phalle (morte en 2002) est une figure exemplaire. Malgré les violences subies (l’inceste paternel), malgré les difficultés liées au milieu, elle, l’autodidacte, imaginera des tableaux-performances en tirant à la carabine sur des toiles préparées, créera des parcs d’attractions hallucinés, fera danser ses monumentales « Nanas », géantes colorées, joyeuses, saisissantes. Elle s’impose et réinvente l’image de la femme.
Le roman que Caroline Deyns lui consacre s’intitule Trencadis :
un mot catalan qui désigne une « mosaïque d’éclats de céramique et de verre »,
autrement dit un « cheminement bref de la dislocation vers la destruction »,
une façon de « briser le quotidien pour inventer le féerique ».
Le livre est construit ainsi, en éclats, en vagues, en souffles, en bonds, alternant le récit, la confidence, les citations, les dialogues, les graphismes. C’est imaginaire, mais parfaitement documenté (quel dommage que Deyns connaisse moins bien la littérature que l’art moderne ! Elle attribue le poème de Gérard de Nerval El Desdichado à Stéphane Mallarmé — ou serait-ce un gag dadaïste ?). L’auteure parvient à associer dans un même mouvement des fragments d’art et des morceaux de vie, pour un écho littéraire, galopant, ardent, du travail de cette plasticienne périmant les vieilles frontières.
Gilles Costaz , Créatrices et minotaures
Nous avons bien le Black Power, alors pourquoi pas le Nana Power ?
Le communisme et le capitalisme ont échoué.
Je pense que le temps est venu d’une nouvelle société matriarcale.
Niki de Saint Phalle, The Houston Post le 25 mars 1969
Fichtre !
Daguenet leur souriait. Maintenant que Nana avait réussi, il ne se cachait plus,
il venait de triompher dans les couloirs. À son côté, le jeune échappé de collège n’avait pas quitté son fauteuil, dans la stupeur d’admiration où Nana le plongeait. C’était ça, c’était la femme ; et il devenait très rouge, il mettait et retirait machinalement ses gants.
Puis, comme son voisin avait causé de Nana, il osa l’interroger.
– Pardon, monsieur, cette dame qui joue, est-ce que vous la connaissez ?
– Oui, un peu, murmura Daguenet, surpris et hésitant.
– Alors, vous savez son adresse ?
La question tombait si crûment, adressée à lui, qu’il eut envie de répondre par une gifle.
– Non, dit-il d’un ton sec.
Et il tourna le dos. Le blondin comprit qu’il venait de commettre quelque inconvenance ; il rougit davantage et resta effaré. On frappait les trois coup, des ouvreuses s’entêtaient à rendre les vêtements, chargées de pelisses et de paletots, au milieu du monde qui rentrait. La claque applaudit le décor, une grotte du mont Etna, creusée dans une mine d’argent, et dont les flancs avaient l’éclat des écus neufs ;
au fond, la forge de Vulcain mettait un coucher d’astre. Diane, dès la seconde scène, s’entendait avec le dieu, qui devait feindre un voyage pour laisser la placelibre à Vénus et à Mars. Puis, à peine Diane se trouvait-elle seule, que Vénus arrivait. Un frisson remua la salle. Nana était nue. Elle était nue avec une tranquille audace, certaine de la toutepuissance de sa chair. Une simple gaze l’enveloppait ;
ses épaules rondes, sa gorge d’amazone dont les pointes roses se tenaient levées et rigides comme des lances, ses larges hanches qui roulaient dans un balancement voluptueux, ses cuisses de blonde grasse, tout son corps se devinait, se voyait sous le tissu léger, d’une blancheur d’écume. C’était Vénus naissant des flots, n’ayant pour voile que ses cheveux. Et, lorsque Nana levait les bras, on apercevait, aux feux de la rampe, les poils d’or de ses aisselles. Il n’y eut pas d’applaudissements. Personne ne riait plus, les faces des hommes, sérieuses, se tendaient, avec le nez aminci, la bouche irritée et sans salive. Un vent semblait avoir passé, très doux, chargé d’une sourde menace. Tout d’un coup, dans la bonne enfant, la femme se dressait, inquiétante, apportant le coup de folie de son sexe, ouvrant l’inconnu du désir.
Nana souriait toujours, mais d’un sourire aigu de mangeuse d’hommes.
– Fichtre ! dit simplement Fauchery à la Faloise.
Émile Zola, Nana
La « contagion » par la « mouche d’or ».
Les fonctions métaphoriques de la mort dans Nana de Zola
Résumé : Nana s’achève sur une célèbre scène qui met en parallèle la mort de l’héroïne
et le début de la fin du Second Empire, marquée par les cris d’une foule parisienne enragée saluant la déclaration de guerre contre la Prusse en 1870. Cette mise en parallèle de la mort de Nana causée par la petite vérole, maladie contagieuse, et d’un événement politique caractérisé par la contagion d’un délire menant une collectivité vers sa destruction consentie, implique que la mort de l’héroïne transcende le niveau purement physiologique. On cherchera à montrer que dans le roman de Zola cette fonctionnalisation métaphorique de la mort est préparée de longue haleine. Il convient notamment de penser à un article de journal intitulé « La mouche d’or », dans lequel l’histoire de Nana est comparée à celle d’une mouche « qui prenait la mort sur les charognes tolérées le long des chemins, et qui, bourdonnante, dansante, jetant un éclat de pierreries, empoisonnait les hommes rien qu’à se poser sur eux ».
Cette analyse des métaphores employées par Zola afin de représenter la mort tiendra compte de l’importance croissante des discours scientifiques dans la seconde moitié du XIXe siècle.
Hal-upec-upem,, Thomas Klinkert
Dès le premier regard, il m'a plu.
Mais j'étais encore sous le choc.
J'exagère peut-être mais j'étais vraiment blessée et j'ai toujours eu peur que mes plaies s'agrandissent.
Je voulais vivre un amour heureux mais j'étais incapable d'avoir confiance en un homme.
Avec Shôji, c'est différent, il est peut-être comme les autres mais pour moi, il est différent.
Avec toi Shôji, je me sens toujours bien parce que tu apaises mon cœur.
Maintenant, j'aimerais que tu me serres fort dans tes bras.
Ai Yazawa, Nana (Manga Volume 1)
Tant que Nana est là, je ne me sens pas seule.
Et comme on est entre filles, pas besoin de me prendre la tête inutilement, ni d'être jalouse.
Je peux toujours rester avec elle en toute confiance.
Comparé à çà, l'amour, ça fatigue, ça fait souffrir.
C'est un produit inflammable, j'en suis lasse.
Ai Yazawa, Nana (Manga Volume 4)
La "the nana"
C'est dans la voix et dans le geste
La "the nana"
C'est the nana avec un zeste
La "the nana"
Quant à la jupe à ras l' bonbon
La "the nana"
C'est pas compliqué mais c'est bon
La "the nana"
Que ça vous mate ou qu' ça vous touche
La "the nana"
C'est l'eau courante au fond d' la bouche
La "the nana"
Et quand ça vous r'file un' galoche
La "the nana"
Tu joues complet dans ton cinoche
Léo Ferré, La « the nana »
C'était une Nana
Une Vénus délaissée
Que l'Amour dézola
© Well, La Mouche d'or
Les étendards que j’ai moi-même choisis :
Gnôle et nana, gnôle et nana, re-gnôle et re-nana, c’est toujours le même refrain.
Je reviens à cette histoire comme quelqu’un qui est parti, mais qui, de toute éternité, devait revenir, et c’est peut-être pour le mieux.
Je n’ai trouvé ni statues, ni bouquets, ni bien-aimée pour me dire :
- Maintenant nous ferons flotter de nouveaux étendards sur le château, et tu les auras toi-même choisis.
…et pour prendre de nouveau ma main, prendre ma main dans la sienne.
Que dalle !
Ma machine à écrire file comme un cheval qui se serait échappé du ciel et plongerait dans le silence,
et les mots galopent en bon ordre, tandis que dehors le soleil brille.
Peut-être les mots se souviennent-ils de moi. On est le 4 mars 1964.
Les oiseaux chantent sur la véranda, derrière la maison, toute une bande d’oiseaux dans une volière,
et j’essaie de chanter avec eux : Gnôle et nana, gnôle sans nana, re-gnôle, et re-nana,
me revoilà en ville.
Richard Brautigan, La vengeance de la pelouse
ˌˌ¡ ๅnɔ nⱯˌˌ ǝɹᴉp sɐd ʇnǝʌ ǝu ꓘO : suoɔɹɐɓ sǝๅ ๅǝddɐꓤ *
Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C'est Vénus tout entière à sa proie attachée.
Jean Racine, Phèdre