Sadiste
"Je suis dans le train et je médite sur le jugement de cette Anglaise.
Elle a dit : "Vous êtes un sadiste." Elle a dit cela comme on dirait
un droguiste, lampiste, fumiste. Mais si un commissaire de police me
demandait ma profession et que je lui répondisse que je suis un
sadiste, quelle opinion irait se faire de moi l'autorité ? Alors que
sadique c'est tout comme sadique, ou politique ou catholique.
J'en suis à ce point de mes étonnantes constatations, quand je
m'aperçois qu'une jeune fille sur la banquette d'en face me regarde.
Elle est jolie. Je me lève, m'incline et lui demande la permission
d'éteindre la lumière, ce que je fais sans attendre sa réponse. Puis je
lui serre la main avec vigueur et m'écrie : "Croyez-moi, mademoiselle,
votre tout dévoué." Elle se dérobe un peu à la violence de mes
protestations et c'est pourquoi je lui prends les deux mains et lui
déclare : "Je vous aime." Elle halète légèrement et du rouge lui monte
aux pommettes. Moi je sens le moment venu de recourir au dernier
argument : à l'aide de l'aiguille qui m'a servi à tricoter la trame de la présente histoire, je m'introduis le long de sa manche et, de la
pointe de mon aiguille, je chatouille la pointe de son sein et c'est
fait, je suis un sadiste et elle m'aime." Luc Dietrich, Le livre des
rêves
"Visqueux mais concupiscent"
Well, En sept mots