Insensible
"Il y a deux ans, lorsque j'ai perdu mon père, je n'avais plus de goût à la vie. Plus rien, plus personne ne trouvait grâce à mes yeux, et je me suis laissée envahir par une force inquiétante et diffuse, qui m'aspirait, m'empêchant de me lever le matin, de sortir et de voir des amis, sans que je puisse rien faire. Je n'avais pas le courage de lire, et regarder la télévision me fatiguait. Je m'endormais facilement, mais je me réveillais prématurément. Je me réveillais, misérable, malheureuse du jour qui se lève, et je me couchais, sans attente du jour qui suit. Je déambulais dans mon appartement, seule, et je commençais à perdre tout espoir de retrouver un sens à mon existence, lorsqu'un matin, j'ai reçu une lettre venant d'Italie, de la part d'un homme qui cherchait des renseignements sur un certain Georges B.
Georges B., c'était le nom de mon père. L'homme qui m'avait adressé ce courrier ne m'en disait pas plus, mais il me priait de lui répondre rapidement, car «c'était une chose importante pour lui». Je lui ai aussitôt renvoyé un message, dans lequel je lui écrivais que je connaissais la personne qu'il recherchait, qu'elle était décédée, et que j'étais sa fille. Quelques jours plus tard, j'ai reçu un mot du même individu. Il me disait qu'il s'appelait Paul M. et qu'il était le fils de mon père.
Alors je me suis souvenue d'une photo, une photo d'un petit garçon que j'avais trouvée dans la veste de mon père. Sans pouvoir l'expliquer, immédiatement, j'ai su que cet homme disait vrai.
Etait-ce parce que je n'y croyais pas, ou que je ne voulais pas y croire? Je n'ai pas pleuré lors de la mort de mon père. J'ai appris la nouvelle que j'attendais, car l'on s'y prépare toujours. Depuis l'enfance, lorsque l'on apprend que la mort existe, on pense à la mort des parents. Je suis restée ainsi, interdite, insensible, je ne ressentais rien sinon un grand vide d'émotion. J'aurais voulu pleurer, mais cela ne me touchait pas, ne m'atteignait pas. C'était comme une nouvelle qui ne m'aurait pas concernée, pour laquelle je me serais sentie désolée, mais pas affectée.
On me présentait des condoléances, mais de moi à moi, je savais qu'il n'y avait personne pour les recevoir." Eliette Abécassis, Mon père
"- A bout portant ? Buuung ?
Magnum, Kalach, Bazoo, Crachats !?!
Et t'as rien eu !?! - Ben non !!!..."
Well, UnSansCible (Haïkus)